• Les réactions d'indignation continuaient de s'exprimer mercredi en Amérique latine, après l'escale imposée la veille à l'avion du président bolivien Evo Morales, des pays européens lui ayant refusé l'accès à leur espace aérien.

    Après les alliés traditionnels - l'Equateur et le Venezuela -, l'Argentine ou encore le Chili ont exprimé leur mécontentement et leur solidarité avec leur homologue bolivien, de mêmes que deux organisations régionales, l'Alba et l'Unasur.

    "Le gouvernement du Chili regrette et refuse le traitement auquel a été soumis le président de la Bolivie", indique un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Le pays "lance un appel à éclaircir ce qui s'est passé".

    Le gouvernement chilien a demandé, en outre, que dans des cas comme celui-ci, "les normes du droit international soient respectées, ainsi que le traitement qu'il se doit à l'avion d'un chef d'Etat".

    Le Chili et la Bolivie n'ont pourtant plus de relations diplomatiques depuis 1978, en raison de l'absence d'accord sur la demande bolivienne d'accès à la mer, perdu lors d'une guerre à la fin du 19e siècle.

    A Buenos Aires, la présidente argentine Cristina Kirchner a estimé qu"'un avion disposant d'une immunité absolue a été illégalement détenu dans la vieille Europe, ce qui constitue un vestige du colonialisme que nous pensions totalement dépassé. Ca n'a pas été seulement une humiliation pour la Bolivie, mais pour toute l'Amérique du Sud", a-t-elle déclaré lors d'une cérémonie officielle.

    L'Union des nations sud-américaines (Unasur, qui regroupe 12 pays), a fait part de sa "solidarité" et de son "indignation" face à des actes qui ont "mis en danger la sécurité" de M. Morales et de son entourage, indique un communiqué du ministère des Affaires étrangères du Pérou, qui exerce la présidence tournante de l'organisation.

    Depuis Caracas, l'Alba (Alliance bolivarienne pour les peuples, qui compte huit membres autour du Venezuela) a critiqué "une situation grave due à l'impérialisme nord-américain et ses alliés européens".

    La veille, le ministre vénézuélien des Affaires étrangères Elias Jaua avait dénoncé "un attentat contre la vie du président Morales" et son homologue équatorien Ricardo Patiño "une terrible offense".

    Le Brésil en revanche, qui avait annoncé lundi qu'il n'étudierait pas la demande d'asile de M. Snowden, n'a pas réagi officiellement aux péripéties du président bolivien.

    Mercredi, le vice-président bolivien Alvaro Garcia a annoncé lors d'une conférence de presse que "plusieurs présidents latino-américains" se réuniraient jeudi sur ce sujet à Cochabamba (centre).

    Mardi soir, le président Morales s'est vu contraint d'effectuer une escale de 13 heures en Autriche après que la France, l'Italie, l'Espagne et le Portugal eurent interdit à l'avion présidentiel bolivien de pénétrer dans leur espace aérien.

    D'après la Bolivie, ces pays suspectaient la présence à bord de l'informaticien américain Edward Snowden, recherché par les Etats-Unis pour espionnage, ce que La Paz a démenti.


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  • Les actions de la France et du Portugal, qui ont fermé leur espace aérien à l'avion du président bolivien Evo Morales suite à une rumeur concernant la présence d'Edward Snowden à bord, constituent une violation flagrante des normes du droit international, a déclaré mercredi l'avocat Alexandre Glouchenkov à l'Agence russe d'information juridico-légale.

    "Il s'agit d'une démarche plus politique que juridique", estime Me Glouchenkov.

    Selon lui, si l'on fait abstraction des "considérations politiques qui poussent les Etats à adopter telle ou telle décision, le passage des aéronefs au-dessus du territoire d'un Etat étranger est réglementé par les normes internationales de l'aviation civile".

    Dans la nuit de mardi à mercredi, la France et le Portugal ont fermé leur espace aérien à l'avion du président bolivien Evo Morales qui revenait d'un sommet des pays exportateurs de gaz organisé à Moscou. Les autorités de ces deux pays européens soupçonnaient la présence de l'ex-agent de la CIA Edward Snowden à bord de l'appareil.

    Au moment où cette décision a été annoncée, l'avion avait déjà volé pendant trois heures et demie. Il a dû atterrir à Vienne, en Autriche, pour se ravitailler.

    Après que le chef de la diplomatie autrichienne a confirmé l'absence du transfuge américain à bord de l'avion présidentiel, Paris et Lisbonne ont donné le feu vert au survol de leur territoire.


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  • La présidente argentine Cristina Fernández de Kirchner a qualifié d'"impunité inadmissible" le comportement de la France et du Portugal, qui ont interdit le survol de leurs territoires à l'avion du chef de l'Etat bolivien Evo Morales, rapportent mercredi les médias argentins.

    "On a vraiment l'impression que tout le monde est devenu fou. Un chef d'Etat et son avion bénéficient d'une immunité totale. Une telle impunité est inadmissible", a écrit Mme Kirchner sur son compte Twitter.

    La France et le Portugal ont fermé mardi leur espace aérien à l'avion du président bolivien Evo Morales qui rentrait dans son pays en provenance de Moscou, Paris et Lisbonne ayant soupçonné la présence de l'ancien agent de la CIA Edward Snowden à bord de l'appareil qui a dû se poser à Vienne, en Autriche, trois heures et demie après son décollage. Après que le chef de la diplomatie autrichienne a confirmé l'absence de l'agent fugitif parmi les passagers de l'avion présidentiel, Paris et Lisbonne ont finalement donné leur feu vert au survol de leur territoire.

    Ce comportement de pays européens ayant interdit le survol de leur territoire suscite une indignation croissante en Amérique latine.

    L'ex-employé de l'Agence nationale de sécurité (NSA) et de la CIA, l'analyste Snowden, est recherché par les Etats-Unis pour ses révélations fracassantes sur le programme d'espionnage américain.

    Trois chefs d'accusation, dont chacun pourrait lui coûter jusqu'à 10 ans de prison, sont retenus contre M.Snowden aux Etats-Unis. Il est notamment accusé de transfert illégal d'informations relevant de la sécurité nationale, de transfert prémédité de renseignements secrets et de détournement de patrimoine public.

    En provenance de Hong Kong, il serait coincé depuis plus d'une semaine à l'aéroport Cheremetievo de Moscou, son passeport ayant été annulé par les Etats-Unis.


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  • Les deux présidents

    Le 3 juillet, le président autrichien est venu soutenir le président bolivien à l'aéroport de Vienne.

    Les deux présidents

    Les deux présidents

    Les deux présidents


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  • Evo à Vienne

    Le président bolivien Evo Morales s'adressant à la presse, à Vienne. L'avion du président bolivien Evo Morales a décollé mercredi à destination de la Bolivie après avoir été contraint à une escale imprévue à Vienne à son retour de Moscou, les espaces aériens français et portugais lui ayant été interdits. La rumeur avait couru qu'Edward Snowden, l'ex-consultant de la National Security Agency (NSA) à l'origine des révélations sur les pratiques de surveillance et d'écoutes du renseignement américain, se trouvait à son bord.


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  • Evo à Vienne

    3 juillet 2013: Nouvel imbroglio diplomatique. Soupçonné d'avoir emmené Snowden dans son avion en provenance de Moscou, le président bolivien Evo Morales doit faire une escale forcée de 13 heures à Vienne après le refus de survol de leur territoire par plusieurs pays européens.

    Evo à Vienne

    Evo à Vienne

    Evo à Vienne


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  • Mardi 2 juillet, l'avion d'Evo Morales, de retour d'une réunion des pays producteurs de gaz naturel à Moscou, a été bloqué à Vienne, en Autriche. La France, l'Espagne, l'Italie et le Portugal, sur le point d'être survolés par son avion, ferment leur espace aérien. Motif : l'avion présidentiel est soupçonné de transporter Edward Snowden. L'arrêt s'éternise ; Evo Morales s'oppose à la fouille de l'appareil. Après plusieurs imbroglios diplomatiques, le président bolivien pourra finalement décoller en fin de matinée, et survoler les pays qui s'y étaient auparavant opposés.

    L'épisode, pour le moins confus, a provoqué l'ire des dirigeants politiques latino-américains. Une colère que certains ont exprimée sur Twitter. A l'image du président vénézuélien Nicolas Maduro, également présent à Moscou lundi, qui a dénoncé une "violation de toutes les règles d'immunité qui protègent les chefs d'Etats" ou non de "l'obsession impérialiste".

     

     

    Sur le réseau social, la personnalité politique la plus prolixe est la présidente argentine, Cristina Kirshner. En direct, elle tweete comment Rafael Correa, le président équatorien, lui a appris par téléphone l'odyssée d'Evo Morales.

     

     

    "Salut Rafa, comment vas-tu ?" Il me répond, contrarié et angoissé. "Tu ne sais pas ce qui se passe ?"

     

     

    "Non, que se passe-t-il ?" Je suis distraite. Etrange, car je suis toujours attentive... et vigilante. Mais je sortais à peine d'une réunion.

     

     

    "Cristina. Ils ont arrêté Evo et son avion, et ils ne le laissent pas quitter l'Europe."

     

     

    "J'appelle Evo. A l'autre bout du fil, sa voix, tranquille, me répond. 'Salut camarade, comment vas-tu ?' Il me demande à moi comment je vais !"

    "SÉQUESTRATION IMPÉRIALISTE"

    Une colère des dirigeants politiques relayée dans les médias boliviens, dont certains sont pourtant notoirement opposés à la politique menée par leur président. A l'image du quotidien El Mundo, qui a largement retransmis l'indignation du vice-président bolivien, Alvaro Garcia.

    "Le président (...) est séquestré en Europe par l'impérialisme. Le mensonge proféré par l'impérialisme (...) a séquestré la vérité, la dignité des peuples ; les puissances étrangères, comme ils le firent il y a 500 ans, agressent et maltraitent le peuple bolivien, et offensent le premier président indien d'Amérique latine", a déclaré Alvaro Garcia. Avant d'accuser, dans El Deber, "une séquestration impérialiste (...) dirigée par le gouvernement américain". 

    "L'Italie, la France, et le Portugal s'aliènent aux Etats-Unis pour attraper Snowden", titre de son côté El Telégrafo, proche du gouvernement. Une théorie étayée dans le quotidien par les propos du ministre des affaires étrangères, David Choquehuanca. "Ils veulent nous effrayer", a-t-il affirmé. Avant d'ajouter qu'il demanderait rapidement des comptes aux gouvernements concernés, pour ce "délit de discrimination" qui a, selon lui, mis la vie du président Morales "en danger".


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  • En Bolivie, les magistrats du Tribunal suprême débattent en ce moment même d'une possible dépénalisation de l'avortement. Dans cet État d'Amérique latine où la pratique est passible de trois ans de prison depuis 1972, la plus haute juridiction du pays étudie un recours déposé par une députée d'origine indigène, Patricia Mancilla, pour légaliser l'interruption volontaire de grossesse.

    Pour demander ce changement radical, la parlementaire invoque la nouvelle constitution votée dans la foulée de l'élection d'Evo Morales, en 2006. Adoptée en 2009, la nouvelle loi fondamentale, en plus de reconnaître pour la première fois les communautés indigènes, interdit les discriminations sexuelles, et reconnaît de fait dans l'un de ses paragraphes la « santé reproductive et sexuelle » des femmes. Bien que la constitution ait été adoptée en 2009, il reste encore beaucoup à faire pour adapter les lois plus anciennes au nouveau texte, notamment pour le code pénal, vieux de 41 ans. Dans ce dernier se trouve notamment l'article 263 qui criminalise l'avortement. Selon un autre article de ce code, un homme voit sa peine de prison divisée par deux s'il a commis un crime pour défendre l'honneur d'une femme. Et d'après un autre passage, un violeur peut échapper à la prison s'il épouse sa victime. C'est contre ces passages du code pénal, douze au total, que Patricia Mancilla a déposé un recours devant le Tribunal suprême, au motif qu'ils étaient désormais inconstitutionnels. Si sa demande aboutit, elle pourrait avoir un impact considérable pour la vie de l'ensemble des femmes en Bolivie.

    La nouvelle Constitution adoptée grâce au président Evo Morales garantit la santé reproductive des femmes et pourrait permettre de légaliser l'avortement. 

    La bataille juridique intervient dans un contexte particulier, après qu'un fait divers a défrayé la chronique l'année dernière. Le 30 janvier 2012, une jeune femme indigène de 27 ans était arrêtée dans son lit d'hôpital et emprisonnée alors qu'elle était enceinte de six mois. Helena - le prénom a été changé - avait été dénoncée par un médecin auprès de qui elle cherchait un traitement d'urgence pour interrompre une grossesse en cas de complications. Elle a aussitôt été inculpée pour avortement illégal. Dans un pays où la violence sexuelle est endémique - 7 femmes sur 10 en sont victimes - Helena était tombée enceinte à la suite d'un viol et « ne voulait pas d'un enfant sans père ». Après avoir avorté et passé une semaine à l'hôpital, elle a été transférée à la « ville-prison » de Palmasola, qui compte 3.000 détenus.

    Dans le district de Santa Cruz d'où elle était originaire, seuls 80 avortements illégaux ont été recensés depuis 2008 - mais aucun ne s'est traduit par une condamnation. Dans la plupart des cas, soit la justice, soit la police ont préféré abandonner les charges. Au terme d'un procès sans juge, sans avocat, et marqué par des reports constants, Helena a été condamnée à deux ans de prison. Elle a pu obtenir une remise de peine et sortir en octobre dernier. Légalement, Helena aurait pu obtenir un avortement thérapeutique. Mais pour cela, il aurait d'abord fallu qu'elle porte plainte pour viol au commissariat de police et ensuite qu'elle en fasse la demande auprès d'un juge. Même de cette manière, elle n'était pas sûre de l'obtenir : depuis 2006, il n'y a eu qu'un seul avortement légal dans tout le pays.

    La Bolivie connaît l'un des taux d'avortement les plus élevés du continent américain, avec les îles de Haïti et Cuba, même si dans ces derniers pays, la pratique est légale depuis plusieurs décennies. Chaque année, entre 40.000 et 80.000 femmes avortent dans le pays, soit 115 avortements par jour. On estime que trois Boliviennes sur cinq auront recours à un avortement au cours de leur vie. La Bolivie partage aussi avec Haïti la particularité d'être le pays d'Amérique avec la plus forte mortalité maternelle : pour 100.00 naissances, 310 femmes y meurent en couche chaque année.


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  • José Mujica : voici les cinq qualités pour faire un Président de légende

    L’Uruguayen José Alberto Mujica, plus connu sous le nom de Pepe, serait le Président le plus pauvre du monde. Il commence aussi à être le plus populaire du même monde, si l’on se fie aux journalistes (par exemple celui du New York Times) qui l’adorent. Son histoire a fait la une de Courrier international, « la préférée des lecteurs en 2012 » (article payant, nous ne l’avons pas lu...).

    La une de Courrier international, 29 novembre 2012 

    Ses réformes – légalisation de la marijuana, mariage des personnes de même sexe, libéralisation des lois sur l’avortement et soutien aux énergies renouvelables – sont évidemment extraordinaires dans le contexte latino-américain, et français pour au moins deux des réformes.

    Mais ce n’est pas ce qui fascine l’opinion internationale, et nous avec. Le président Mujica, 77 ans, ne passe pas ses vacances sur le yacht d’un bon ami, il a gardé la même épouse de toujours, il n’a pas appris à se faire servir. Il parle mal à certains de ses concitoyens. Il tue le job de Président.

    Mujica et sa chienne Manuela (Capture d’é ; cran, DiariolaRepublica.net)

    Quand il a été élu président de la République le 29 novembre 2009, il n’a pas souhaité déménager de la petite maison (son « rancho » comme on appelle en Uruguay les habitations pauvres), 45 m² dans une banlieue pauvre de Montevideo, où il vit depuis vingt ans avec sa femme et sa chienne Manuela, une bâtarde.

    La maison ne lui appartient même pas, elle est à sa femme, Olga, qu’il appelle affectueusement « mi vieja » (ma vieille).

    Un journaliste du quotidien espagnol El Mundo raconte qu’il l’a vu se rendre dans une droguerie de quartier pour acheter un siège de WC, et qu’il a accepté sur-le-champ une invitation des jeunes du petit club de foot Huracan, et là-bas, ils ont eu une petite discussion autour... du siège de WC.

    Mujica prépare le maté (Capture d’é ; cran, NYTimes.com)

    Il reverse 90% de son traitement (250 000 pesos, environ 9 000 euros) à différentes ONG, conduit lui-même sa vieille voiture, une Volkswagen, son seul bien, d’une valeur de 1 400 euros – même si actuellement il dispose du véhicule présidentiel, une Chevrolet Corsa.

    Chaque fois qu’on lui pose la question, et c’est assez fréquent, voire inévitable, « êtes-vous pauvre ? » il répond :

    « Mon style de vie n’a rien de révolutionnaire, je ne suis pas pauvre, je vis de manière austère. »

    En septembre dernier, il est apparu à une importante conférence latino-américaine du Mercosur avec le nez cassé : il a expliqué qu’il s’était blessé en aidant un voisin à réparer sa maison détruite lors d’intempéries.

    Ce jour-là, il avait envoyé un message de soutien à tous ceux dont les maisons avaient été endommagées par le déluge :

    « Chaque fois qu’il a plu, il a bien fini par s’arrêter de pleuvoir. Idem pour le vent. »

    Mais il a fini par se fâcher :

    « Nous sommes un petit pays avec une majorité d’habitants qui a choisi de vivre sur la côte et qui attend qu’il fasse un peu de vent pour ne pas aller travailler. La fatigue, ce n’est pas notre problème. »

    Il sait parler « vrai » aux jeunes délinquants. Là, c’était après l’assassinat d’un pizzaiolo de 34 ans, père de cinq enfants :

    « Ne vous comportez pas comme des petits cons, des nains de merde. Vous allez finir comme des rats de prison, dans le meilleur des cas. »

    (En espagnol)

    Pepe Mujica a appris à vivre à la dure dans les prisons qu’il a fréquentées sous la dictature, entre 1973 et 1985. Il était un des dirigeants de la guérilla Tupamaros et a été torturé tout au long de sa détention. Il a raconté dans de rares interviews que les nuits où on lui donnait un matelas, il était content.

    Lors de la célébration du centenaire d’un hôpital psychiatrique, il a expliqué que, « des problèmes de psychiatrie, il n’y en pas qu’ici, ils sont aussi dehors... nous sommes tous fous ». L’assistance a ri de la plaisanterie. Alors il a continué :

    « Il y a de ça des années, quand j’étais en prison, j’ai souffert d’une paranoïa persécutrice infernale. J’entendais des voix. Ils m’ont envoyé dans un hôpital psychiatrique. »

    Pepe Mujica n’a pas que des amis en son pays. Un ancien administrateur de la banque Republica, dit de lui que :

    « Son style, c’est celui du café du commerce, celui de philosopher sans fin et de ne rien faire. »

    Il aime s’exprimer, et parmi ses nombreux apartés philosophiques, j’ai choisi celui-ci, tiré d’un entretien à La Republica :

    Mujica, dans sa ferme (Capture d’é ; cran, ElPais.com)

    « Je veux avoir du temps pour les choses qui me motivent. [...] C’est ça la vraie liberté : la frugalité, consommer peu, avoir une petite maison qui me laisse du temps pour profiter de ce que j’aime vraiment.

    Sinon, il faudrait que j’ai une domestique, et je devrais supporter une présence étrangère chez moi. Et si j’avais beaucoup de choses, il faudrait que j’en prenne soin pour qu’on ne me les volent pas. La vieille ou moi, on passe le balai, et voilà, il nous reste beaucoup de temps, c’est ça qui nous enthousiasme. »

    Ses discours internationaux tranchent, et réjouissent une partie de la population latino-américaine. Celui qu’il a donné lors du sommet Rio+20, en juin 2012, sans cravate – personne n’a jamais pu lui en faire porter –, est une sorte de manifeste personnel, qui a fait un flop dans son pays :

    « Mes compagnons travailleurs ont lutté pour obtenir les huit heures de travail quotidien. Là, ils vont obtenir les six heures. Mais celui qui obtient les six heures prend un deuxième emploi, et donc il travaille bien plus qu’avant. Pourquoi ?

    Parce qu’il doit payer un tas de dettes. La petite moto qu’il a achetée à crédit. La petite auto qu’il a achetée à crédit. Et rembourser ses dettes et encore les rembourser. Et quand il peut enfin profiter de tout ça, c’est un vieux plein de rhumatisme, comme moi, et sa vie est déjà derrière lui. »

    Ses dernières vacances d’été (de Noël dans l’hémisphère Sud), il les a passées comme un petit retraité. Avec Olga, aux terrasses de cafés, sans garde du corps. La photo a fait le tour de Twitter.

    Así vacaciona Pepe Mujica y la Primera Dama de Uruguay, Lucía Topolansky [foto] twitter.com/radiomitre/sta…


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  • Les relations diplomatiques entre le Chili et la Bolivie ont été rompues en 1978 par le régime militaire du général Hugo Banzer, excédé par le rejet systématique par Santiago des demandes réitérées de la Bolivie pour obtenir "un accés souverain à la mer", afin d'en finir avec sa situation de pays enclavé.

    La polémique a été portée sur la scène internationale dimanche par le président vénézuélien Hugo Chavez qui a estimé que la Bolivie dispose d'"un droit légitime et historique" à un accés au Pacifique.

    La guerre du Pacifique, provoquée par un conflit sur l'exploitation de riches gisements de guano et de salpêtre dans la région d'Antofagasta, a opposé le Chili à la Bolivie et au Pérou, unis par des traités d'assistance et de protection mutuelle.

    Lors de cette guerre, le Chili s'est emparé de quelque 350 km de côtes appartenant au Pérou et à la Bolivie, privant ce pays de son accés à la mer.

    La Bolivie a par la suite perdu près de 300.000 km2 lors d'un conflit armé contre le Brésil en 1903 et de la Guerre du Chaco contre le Paraguay entre 1932 et 1935.


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  • URUGUAY; José Mujica : “Le héros méconnu de l’Amérique latine”

    Ancien guérillero, sorti de quinze ans de détention presque fou, José “Pepe” Mujica est atypique : à 77 ans, il vit dans une ferme… et fait un tabac sur les réseaux sociaux. Il défend de grandes idées pour son tout petit pays.

    Le personnage de Pepe Mujica figurerait aussi bien dans une histoire de gauchos [gardiens de troupeaux de la pampa argentine] que dans un roman sur la lutte armée. Militant des Tupamaros, la principale guérilla urbaine du pays, il fut atteint de six balles et emprisonné pendant quinze ans, dont onze à l’isolement total, où il alla jusqu’à boire sa propre urine pour ne pas mourir de soif. A 59 ans, il participe à sa première élection, qu’il gagne comme toutes les suivantes : du Sénat jusqu’à la présidence, il y a deux ans et demi.

    Les jeunes du continent ont découvert Mujica en juin dernier, lorsqu’il a annoncé que l’Uruguay pourrait légaliser le commerce de la marijuana. L’autre image qui circule sur les réseaux sociaux est celle d’un homme politique plutôt sympa, décrit dans un reportage du quotidien espagnol El Mundo comme “le président le plus pauvre du monde”. Un article de la revue britannique Monocle prétend qu’il est “le meilleur président du monde” et “le héros méconnu de l’Amérique latine”. Mujica habite dans une ferme du nom de La Puebla, aux environs de Montevideo, avec une seule chambre et une toiture en zinc. Il reverse 90 % de son indemnité présidentielle d’un montant de 260 259 pesos [10 200 euros]. Son seul bien est une Coccinelle bleue de 1987. Sur le site de la présidence, sa profession officielle est celle d’exploitant agricole. L’Uruguay est le deuxième pays le plus petit d’Amérique du Sud, le moins corrompu (selon l’ONG Transparency International) et le plus sûr. Malgré tout, la criminalité progresse et constitue la principale préoccupation des Uruguayens. Cette année, 211 assassinats ont été commis. Ces chiffres peuvent paraître risibles, car chaque jour il y a pratiquement le même nombre de personnes tuées au Brésil ; mais c’est beaucoup plus que les 183 comptabilisés en 2011. La violence conjugale est également un motif d’inquiétude : 9 325 cas ont été relevés en 2011, et ce nombre se monte déjà à 12 004 pour l’année en cours. Mujica a tenté de nous donner une explication en évoquant la perte des valeurs familiales, tout en précisant qu’un psychiatre serait plus compétent pour analyser le sujet. “Etre président ne signifie pas que l’on a la science infuse.”

    S’excuser de sa franchise

    Pepe Mujica ne compte pas ses mots, parle cru, fait des fautes de grammaire ou encore utilise des expressions que les jeunes générations ne comprennent pas. Il est courant qu’il fasse appel à des métaphores paysannes pour expliquer sa façon de gouverner. Un jour, il a tout de même dû s’excuser de sa franchise. Dans un recueil d’entretiens intitulé Pepe. Colóquios [Pepe. Conversations], lancé en pleine campagne présidentielle, il affirmait que les Kirchner [Néstor et Cristina Kirchner, tour à tour présidents de l’Argentine] étaient des “péronistes délinquants”, que l’ancien président Carlos Menem était “un mafieux et un voleur” et les Argentins “des hystériques, des fous et des paranoïaques”. Historiquement, l’Uruguay a toujours eu la sensation d’être pris en étau entre deux géants : le Brésil et l’Argentine. D’un siècle à l’autre, le pays est passé du statut de région objet de dispute frontalière entre les empires portugais et espagnol à celui d’Etat-tampon. “C’est un morceau de coton entre deux cristaux”, notait dans la première moitié du XIXe siècle John Ponsonby, un ministre britannique envoyé en mission diplomatique dans l’estuaire du Río de la Plata. Le pays a une population réduite (plus de 3 millions d’habitants depuis dix ans) et âgée : les plus de 60 ans représentent 19 % de la population (11 % au Brésil). A cela s’ajoute la forte émigration des jeunes en quête de travail à l’extérieur.

    Les vieilles chaussures

    Par ailleurs, le personnel politique de l’Uruguay se renouvelle peu. Les principales figures de l’opposition sont d’anciens présidents ou des héritiers de familles qui se relayaient au pouvoir avant l’arrivée à la présidence du Frente Amplio, en 2005. Jusqu’en 1971, le pays connaissait le bipartisme : il y avait le parti Colorado et le parti Blanco (Partido Nacional), tous deux composés de groupes d’orientation centriste et de droite. Les colorados sont historiquement liés à l’élite commerciale urbaine, et les blancos aux grands propriétaires terriens. Fondés en 1836, ces deux partis figurent parmi les mouvements politiques les plus anciens de la planète. Le Frente Amplio est donc apparu en 1971. Il représente tout l’éventail de la gauche, des communistes aux sociaux-démocrates. Tabaré Vázquez, le prédécesseur de Mujica, est devenu en 2005 le premier président issu du Frente Amplio. Cancérologue, il a continué pendant sa présidence à recevoir ses patients le mardi et il est aujourd’hui plus populaire que Mujica. En Uruguay, où le mandat dure cinq ans sans possibilité de réélection immédiate, Tabaré Vázquez est le favori pour la présidentielle de 2014.

    L’ancien président Luis Lacalle [dirigeant du Parti national Blanco] est un homme hyperactif, à l’apparence aristocratique. Il me reçoit dans son bureau au Sénat et se montre d’emblée critique envers Mujica. Il affirme que le président manque d’autorité, est incapable de tenir ses promesses bien qu’il ait la majorité au Parlement et il lui reproche ses décisions clientélistes. “Il y a 100 000 personnes qui gagnent un salaire sans travailler. On leur donne de l’argent sans aucune contrepartie et peu importe si les enfants vont à l’école ou non.” En réalité, ce programme social exige que les familles maintiennent leurs enfants à l’école : 412 000 enfants et adolescents bénéficient ainsi de l’Asignación Familiar, l’équivalent de la Bolsa Familia au Brésil, créée sous la présidence de Tabaré Vázquez. Pour Lacalle, l’ancien président “est une personne plus sérieuse, une sorte de social-démocrate français. Mujica est un homme plus radical. Il a inventé Pepe, un personnage folklorique plus important que sa personne.” “Il dépasse les bornes quand, par exemple, il se rend à un sommet politique avec de vieilles chaussures”, ajoute-t-il. Quelques semaines auparavant, en effet, le président s’était rendu au Brésil pour rencontrer Hugo Chávez, Cristina Kirchner et Dilma Rousseff. Ce sommet officialisait l’entrée du Venezuela dans le Mercosur. Le lendemain, le quotidien brésilien O Globo publiait à la une un cliché de la rencontre, soulignant en légende un moment de décontraction des trois chefs d’Etat [soi-disant] étonnés par l’état des chaussures de José Mujica. Avant de partir, il avait dit à sa femme, la sénatrice Lucía Topolansky : “Je vais devoir bien me comporter aujourd’hui avec ces deux dames [Mmes Kirchner et Rousseff].”

    Lucía, son grand amour

    Mais il s’est tout de même contenté de prendre des bottines marron en cuir usées. Dans l’avion, il avait indiqué à ses assesseurs : “Ce ne sont pas les meilleures chaussures pour un sommet, mais je suis à l’aise dedans.” Ceux qui étaient avec lui au palais présidentiel de Brasília n’ont pas entendu de commentaires à ce sujet, mais, au moment de la photo officielle, il y avait un papier au sol spécifiant à quel endroit devait se mettre chacun des chefs d’Etat. Et tous regardaient par terre, d’où la photo d’O Globo. Dilma, Cristina et Chávez n’ont peut-être rien vu, mais l’opposition uruguayenne s’en est aperçue et n’a pas aimé. A une autre époque, Mujica se préoccupait encore moins de son apparence. Lorsqu’il était député et sénateur, il se rendait au Congrès avec des bottes en caoutchouc tachées de terre. Mujica travaillait dans ses champs au petit matin et partait ensuite les ongles sales, en Vespa ou au volant de sa Coccinelle. Son style négligé, indifférent au protocole, a peu à peu attiré l’attention des journalistes et rendu furieuse l’opposition, tandis que Mujica gagnait en importance. Lors de la campagne pour l’élection présidentielle, son rival, Luis Lacalle, a qualifié sa maison de “taudis”. ­“Je l’ai invité à prendre un café, mais il a refusé”, souligne, amusée, Lucía Topolansky. Elle vit avec Mujica depuis 1985, mais ils ne se sont mariés qu’en 2005, discrètement, chez eux. Lucía a 68 ans et semble être en parfait accord avec son mari : pas seulement politiquement, mais aussi parce qu’elle a les mêmes cheveux blancs et courts, des vêtements simples, pas de boucles d’oreilles ni d’ongles vernis. Elle nous reçoit dans son bureau du Sénat, les murs sont décorés de photos de Mujica, du Che et de Carlos Gardel.

    Jamais de cravate

    Le roman politique de ces deux-là débute par le militantisme au sein du Mouvement de libération nationale–Tupamaros (MLN-T), quand ils voulaient en finir avec le capitalisme, et il a atteint son apogée lorsqu’elle l’a fait prêter serment comme président, en tant que la sénatrice la mieux élue en 2009. Lucía et Mujica ont eu d’autres conjoints durant leur période de clandestinité ; le sien a été tué. Mujica, lui, connaissait déjà la sœur jumelle de Lucía, mais il ne rencontra celle-ci pour la première fois que trois mois avant son emprisonnement. C’était en 1971. Tous deux s’évadèrent de prison – lui lors d’une évasion entrée au Livre des records de par le nombre d’évadés (111), elle en empruntant les égouts avec 37 autres femmes –, mais ils furent repris peu après. C’est seulement en 1985, avec la loi d’amnistie, qu’ils se sont retrouvés. Ils ont vécu un temps chez la mère de Mujica, à quelques minutes de la ferme qu’ils ont achetée par la suite.

    Les voisins racontent que pendant longtemps la maison était en adobe avec un toit de paille. La ferme est située dans le quartier Paso de la Arena, à la sortie ouest de Montevideo, où prospèrent la petite industrie, l’agriculture et l’élevage de poulets. Ironiquement, la maison de Mujica est située sur le chemin Colorado, derrière des arbres imposants qui la cachent aux regards extérieurs. Deux policiers, pas plus, la surveillaient le matin de notre venue, en août dernier. Mujica a refusé de s’installer dans la résidence officielle de la présidence, le palais Suárez y Reyes à Montevideo. Mais la ferme et lui ont dû quelque peu changer. Le président se rase désormais et il est obligé de porter un blazer, mais jamais de cravate ! Dans sa maison, des caméras de surveillance ont été installées. Mais Lucía et Mujica ne vivent pas seuls. Trois autres familles sont installées sur le domaine, géré sous forme de coopérative. Deux d’entre elles sont de vieilles connaissances politiques et la troisième a connu un temps des difficultés financières. Le testament du couple stipule que ces familles pourront continuer à vivre là après leur mort tant que cela leur sera nécessaire, puis le terrain sera destiné à une école agricole qu’ils sont en train de monter. Lucía et Mujica vivent chez eux uniquement avec leur chienne Manuela, handicapée d’une patte après avoir été écrasée par Mujica au volant d’un tracteur. “Il y a eu des compagnons qui ont eu des enfants. Moi, j’ai toujours fait le choix de la liberté et je n’en ai pas eu à cette époque, confesse la sénatrice. Mais il y a toujours des enfants dans la maison.”

    Negro Nievas, un infirmier et tourneur mécanique à la retraite âgé de 73 ans, est l’un des voisins de Mujica. Il nous montre des photos d’un barbecue en famille faites un week-end avec le couple présidentiel. Nievas possède une Ford Falcon bleue de 1975. Ils se sont connus lorsqu’il avait 7 ans. Ils étaient voisins et fréquentaient la même école. Quand je l’interroge sur leur enfance, il raconte que la mère de Mujica avait une boutique, près de l’école, où elle vendait du matériel scolaire et des fleurs. Il se met à pleurer. A plusieurs reprises, il est ému lorsqu’il parle de son ami.

    Le président est obnubilé par les gens qui se retrouvent sans toit. Il a vendu des bâtiments publics, dont une résidence officielle à Punta del Este [célèbre station balnéaire du sud-est du pays], pour construire des logements sociaux et il a même proposé d’ouvrir le palais présidentiel aux sans-abri si les places venaient à manquer l’hiver dans les centres d’hébergement. De surcroît, il reverse la majorité de son indemnité présidentielle pour alimenter le plan logement du gouvernement dénommé “Ensemble”. Sympathisant du Parti national et commentateur politique de la radio El Espectador, Graziano Pascale a été, en 2007, le premier journaliste à affirmer que Pepe Mujica pourrait être le candidat du Frente Amplio. “Mujica, c’est ce vieil oncle un peu fou que l’on a tous dans nos familles. L’élire président a été une folie collective. Son personnage public ne s’accorde pas avec la vie normale de l’Uruguayen.”

    José Alberto Mujica Cordano est le premier enfant né du mariage de Demetrio Mujica et Lucy Cordano. Son père est mort jeune et sa dernière sœur est née avec des moyens intellectuels limités. C’est lui qui a toujours aidé sa mère, en plantant par exemple des Callas [l’arum des fleuristes] à Rincón del Cerro, où se trouve aujourd’hui sa ferme. Lucy bénéficiait également de l’aide financière de son père, un immigré italien qui possédait une propriété de cinq hectares. Au lycée, José Alberto s’oriente vers le droit avant de s’engager politiquement à gauche. Dans une biographie écrite par un journaliste, il décrit ces années-là : “J’étais à moitié anarchiste. Le militantisme étudiant m’a en quelque sorte politisé. Je suis toujours anarchiste, pas mal libertaire, c’est incontestable.” Le MLN-T apparaît en 1965. Lorsqu’il rejoint le groupe, Mujica est lié à l’Union populaire, une organisation de gauche créée par des dissidents du parti Blanco. Lorsqu’on a demandé à Mujica s’il avait déjà tué quelqu’un, il a répondu qu’il visait mal. Quand le coup d’Etat se produit, la guérilla est déjà désarticulée et ses principaux leaders, dont Mujica, sont emprisonnés comme “otages” du gouvernement afin d’être exécutés en cas de nouvelles attaques du MLN-T. “Nous avons été le produit social d’une époque”, souligne Lucía Topolansky.

    Anahit Aharonian, une militante uruguayenne emprisonnée avec Lucía, a toujours l’âme tupamara. “Etre tupamaro, cela signifie que l’on continue à lutter pour la justice sociale. Le changement, ce n’est pas de donner quelques pièces aux gens. Je ne veux pas d’un bon capitalisme, il est impossible de l’humaniser.” Elle est agronome et nous reçoit chez elle, loin du centre de Montevideo. Elle fait partie des gens déçus par la présidence de Mujica. Elle regrette également que sa femme refuse de parler du passé. “Avec Lucía, on n’a jamais travaillé sur la mémoire. Elle disait toujours : ne me prenez pas la tête avec ça.” Le président a même défendu la simple détention à domicile, du fait de leur grand âge, pour les quelques militaires emprisonnés en raison des crimes commis pendant la dictature. La sénatrice Constanza Moreira affirme qu’il a fallu convaincre Mujica de se porter candidat.

    Il pensait qu’il était trop vieux pour cela. Pendant la campagne, Lucía était à la fois secrétaire et attachée de presse. Il disait aux journalistes que, s’il n’était pas élu, il ne serait plus sénateur et se consacrerait à la culture des blettes. Mujica a fait campagne en promettant un gouvernement plus proche de celui de Lula, son ami et son modèle politique, que de celui de Chávez. Mais il maintient de bonnes relations avec son homologue vénézuélien. Comme les partis sont plus importants que les personnalités en Uruguay, Tabaré Vázquez est à nouveau un choix logique pour le Frente Amplio en vue de l’élection présidentielle de 2014, car il est le candidat le plus consensuel pour la coalition au pouvoir. Daniele Astori, le vice-président actuel [battu aux primaires par Mujica en 2009, ministre de l’Economie de Vázquez], pourrait être une alternative. Il est en partie responsable de la politique économique à succès du pays. Les salaires ont progressé de 36,6 % en sept ans, grâce notamment à une croissance économique moyenne de 6,4 %. Le taux de chômage, 5,3 %, est au plus bas ; 13,7 % des Uruguayens vivent sous le seuil de pauvreté, soit une baisse de cinq points en un an. L’analphabétisme a quasiment disparu en Uruguay et tous les enfants sont scolarisés. Aucun des pays du Mercosur n’a des indicateurs sociaux aussi bons. Les enquêtes d’opinion les plus récentes montrent que 39 % des Uruguayens approuvent le gouvernement du Frente Amplio et que 49 % apprécient Mujica. Au début de son mandat, il avait 20 % de plus d’opinions favorables. Les bisbilles avec l’Argentine, la violence, l’impression que le président parle plus qu’il ne fait et la faillite de Pluna, l’unique compagnie aérienne uruguayenne, explique en partie cette chute dans les sondages.

    Mujica aime philosopher et c’est un passionné d’anthropologie et de botanique. Il a pour habitude de parler à la nation de la nature humaine et de “la fragilité de notre écorce civilisatrice”. “Les gens doivent avoir à l’esprit qu’être vivant est un miracle. Nous sommes venus du silence minéral et nous retournerons dans le silence minéral”, a-t-il affirmé récemment. Mujica explique qu’il a choisi d’être pauvre pour être riche et il évoque toujours comme une prison le fait de payer à crédit des biens matériels. Lors de la récente conférence du groupe Rio + 20 [en juin 2012], il a également expliqué que “les vieux penseurs – Epicure, Sénèque et même les Aymaras – définissaient le pauvre non pas comme celui qui a peu, mais comme celui qui a une infinité de besoins et désire toujours plus que ce qu’il a”.

    Psychose délirante

    Parmi les neuf anciens dirigeants tupamaros qui étaient considérés comme “otages” pendant la dictature, on prétend que deux sont sortis de prison affaiblis mentalement : Henry Engler et Pepe Mujica. Engler, à qui on diagnostiqua une psychose délirante, présenta en 2002 à Stockholm, lors de la conférence mondiale sur Alzheimer, le travail le plus important sur cette maladie depuis sa découverte. Aujourd’hui âgé de 65 ans et directeur du Centre uruguayen d’imagerie moléculaire à Montevideo, Engler nous a confié pour quelle raison Mujica et lui étaient arrivés aussi loin, après être presque devenus fous. “Dans la lutte pour se surpasser soi-même, on laisse de côté les pensées de haine et de rancœur, et la solidarité se transforme en une forme de satisfaction permanente. On peut également survivre à travers la haine, mais on ne trouve pas le bonheur de cette façon-là. Aujourd’hui, nous sommes fous, mais fous de nombreux rêves.”

    Fin décembre 2011, Mujica a visité un hôpital psychiatrique. Il a évoqué l’époque de sa folie avec les médecins et les patients. Et il leur a expliqué que, dans son cachot, il entendait des bruits et était devenu fou. Il était suivi par une psychiatre, on lui donnait de nombreux médicaments, qu’il jetait ensuite. “Mais cette femme m’a beaucoup aidé en obtenant que je puisse lire et écrire. Cela faisait des années que je n’avais rien lu ni écrit”, déclara-t-il. Mujica précisa ensuite qu’il avait demandé des ouvrages de chimie afin de les copier et de pouvoir organiser sa pensée. De sorte qu’il récupéra la raison et put, à sa sortie de prison, retourner à la politique et accéder à la présidence. “Et me voilà ici, encore plus fou qu’avant.”


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  • En juin dernier, lors de la conférence sur le développement durable des Nations unies Rio + 20, le président de l’Uruguay a fait un discours qui a été repris des centaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux. Extraits.

    “Nous ne pouvons pas continuer, indéfiniment, à être gouverné par les marchés ; nous devons gouverner les marchés. […]

    Les anciens penseurs Epicure, Sénèque ou même les Aymaras disaient : ‘Celui qui est pauvre n’est pas celui qui possède peu, mais celui qui a besoin de beaucoup et qui désire toujours en avoir plus.’ […]

    Je viens d’un petit pays très riche en ressources naturelles. Dans mon pays, il y a 3 millions d’habitants. Un peu plus de 3 millions. Mais il y a aussi 13 millions de vaches, les meilleures du monde. Près de 8 à 10 millions de moutons parmi les plus succulents. Mon pays exporte de la nourriture, des produits laitiers, de la viande. C’est une grande plaine où près de 80 % du territoire est exploitable. Mes compatriotes se sont battus pour obtenir la journée de travail de huit heures. Aujourd’hui, ils travaillent six heures. Mais celui qui travaille six heures doit cumuler deux boulots ; donc il travaille encore plus qu’avant. Pourquoi ? Parce qu’il accumule les crédits à rembourser : la moto, la voiture… toujours plus de crédits. Et, quand il a fini de payer, c’est un vieillard perclus de rhumatismes, comme moi, et la vie est passée. Je vous pose la question. Est-ce que c’est cela la vie ? Nous touchons ici au cœur du problème. Le développement ne doit pas être opposé au bonheur, il doit favoriser le bonheur des hommes, il doit favoriser l’amour, les relations humaines, permettre de s’occuper de ses enfants, d’avoir des amis, d’avoir le nécessaire. Parce que c’est précisément la chose la plus précieuse. Et, dans notre combat pour l’environnement, n’oublions pas que l’élément essentiel, c’est le bonheur des hommes. Merci.


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  • «Grâce à cette loi, de nombreuses vies de femmes seront épargnées», a déclaré le président de l’Uruguay suite à l’approbation mercredi dernier par le parlement d’un texte ­faisant de son pays le premier d’Amérique du Sud à dépénaliser l’avortement. Le parlement avait déjà approuvé une loi similaire il y a quatre ans, mais Tabaré Vazquez, le médecin président de l’époque, y avait opposé son veto. José Mujica, président depuis mars 2010, a quant à lui toujours dit ne jamais vouloir faire usage de son droit de veto envers une loi approuvée par l’assemblée. Une attitude loyale vis-à-vis du Frente Amplio, le parti qui l’a porté au pouvoir, et qui caractérise toute la vie politique de celui que certains n’hésitent pas à surnommer le Mandela de l’Amérique du Sud.

    Né il y a 77 ans dans les environs de Montevideo, José Mujica en a tout juste 6 lorsque son père, petit propriétaire terrien, meurt ruiné. Pepe, diminutif de José en espagnol, achèvera sa scolarité obligatoire dans les écoles de son quartier, mais ne terminera pas le collège préparatoire à la faculté de droit. Il s’initie alors à la politique grâce à un oncle admirateur d’un Peron qui fait rêver les plus pauvres sur l’autre rive du Rio de la Plata, en Argentine. Pepe a 21 ans lorsqu’il est nommé secrétaire des jeunesses du parti national, éternel rival du parti Colorado au pouvoir. Dans les années 60, il se radicalise et intègre le mouvement de libération des Tupamaros, promoteur de la guérilla urbaine. Atteint six fois par les balles de la police, José Mujica passera 15 ans en prison.

    Libéré en 1985 au retour de la démocratie, José Mujica reprend sa vie de militant et sera élu député en 1994. Nommé en 2005 ministre de l’Agriculture sous la présidence de Tabaré Vazquez, premier président de gauche post-dictature, José Mujica lui succédera quatre ans plus tard. Arrivé au pouvoir, il lance rapidement un plan de construction d’habitations pour les plus démunis, un plan original puisqu’il demande aux futurs habitants de s’impliquer dans la conception de leur logement. Le financement est assuré par son salaire de président et par la vente des biens de l’Etat tombés en désuétude, comme l’ambassade de Buenos Aires.

    Pepe fait la fierté des Uruguayens et l’admiration des Argentins. En effet, le président fait preuve d’une probité inédite en Amérique du Sud. José Mujica loge toujours dans sa modeste ferme familiale, dans la banlieue de Montevideo, où, avec sa femme, il cultive les fleurs qui font tourner la petite affaire familiale. Non content d’être végétarien dans un pays où la consommation de viande est élevée en dogme, le fleuriste a toujours déclaré qu’il ne croyait pas en Dieu. Deux convictions qui le situent plus proche d’un Martien que d’un compatriote aux yeux des Uruguayens.

    La dépénalisation de l’avortement a provoqué un électrochoc en Uruguay. Les débats ont été vifs, à l’image de ce qu’ont pu connaître bon nombre de pays occidentaux. La victoire ne semble pas encore tout à fait acquise, les opposants soutenus par une Eglise hors d’elle ont déjà brandi la menace du référendum. Ce qui n’empêche pas les artisans de la loi de dormir, les derniers sondages indiquant que les Uruguayens étaient pour à 52% et contre à 34%. Autre dépénalisation en vue, celle de la marijuana. Le président uruguayen veut nationaliser son commerce pour mieux contrôler la délinquance et mieux s’occuper des toxicomanes. «Le problème ce n’est pas la marijuana, mais le narcotrafic», a-t-il récemment déclaré pour justifier son initiative.

    Atypique, José Mujica n’a cependant pas que des admirateurs: nombre de ses compatriotes estiment que la délinquance, problème numéro un des Uruguayens, n’a pas diminué, et que le nombre de ses actions est inversement proportionnel à celui de ses promesses. Mujica n’en a cure, il veut faire de son pays un pays développé, tout au moins dans les mentalités. Souvent comparé à la Suisse pour son secret bancaire, l’Uruguay pourrait bientôt l’être aux Pays-Bas pour sa politique sociale.Buenos Aires


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  • L'ancien chef guérillero tupamaro José Mujica a prôné dans les années 60 la lutte armée contre le système capitaliste et l'Etat bourgeois. Aujourd'hui, il se revendique moins du Vénézuélien Chavez que du Brésilien Lula, son "modèle", car il fait "de la négociation permanente le centre de sa politique".

    Mujica, 74 ans, a cofondé au début des années 60 la guérilla d'extrême-gauche du Mouvement de Libération national-Tupamaro (MLN-T), qui prônait la lutte armée contre le système capitaliste et l'Etat "bourgeois". Le MLN-T s'est fait connaître par des opérations spectaculaires: attaques de banques et de casinos, enlèvements de hauts fonctionnaires, dénonciations de corruption.

    En 1970, Mujica est grièvement blessé par balles et fait prisonnier avant de participer à l'évasion la plus spectaculaire de l'histoire de l'Uruguay, quand 111 prisonniers s'enfuient de la prison "Liberté" de Punta Carretas.

    A l'époque, les actions des "Tupamaros", dans un pays frappé par une grave crise économique, contribuent à la radicalisation du climat politique, qui dégénère en un coup d'Etat militaire en juin 1973.

    Treize ans de prison

    "Pepe", arrêté dès 1972, reste en prison dans des conditions très dures de détention et d'isolement jusqu'au retour de la démocratie, treize ans plus tard.

    Après l'amnistie de 1985, Mujica réintègre la vie politique. En novembre 1994, il est le premier ancien guerillero élu à la chambre des députés.

    Arrivé en scooter au parlement, cet homme rond et moustachu vêtu d'un jean et d'une chemise, est refoulé par les gardes. Il attendra une visite au Brésil, 14 ans plus tard, pour porter son premier costume.

    Devenu ministre de l'Agriculture (2005-2008), son franc-parler déclenche souvent des polémiques. Comme lorsqu'il traite l'Argentine voisine, partenaire obligée de l'Uruguay, de nation "irrationnelle et hystérique".

    Des fleurs

    Elevé par sa mère après la mort de son père, un paysan ruiné, il a grandi en cultivant des fleurs. Aujourd'hui, il continue et propose d'organiser ses conseils des ministres dans sa "chacra", sa petite ferme des environs de Montevideo. "Pepe" reverse une partie de son salaire à une fondation d'aide aux petits producteurs.

    "Pepe" est marié, depuis peu, avec une ancienne guérillera, Lucia Toplanski qui a partagé 25 ans de sa vie. Il n'a pas d'enfant.


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  • L’ex-guérillero José Mujica, candidat de la coalition de gauche au pouvoir, a remporté dimanche, avec 49 % des voix, le premier tour de l’élection présidentielle en Uruguay, mais devra faire face à un ballottage serré contre l’ancien chef de l’État libéral, Luis Alberto Lacalle. Le second tour aura lieu le 29 novembre. Les Uruguayens ont par ailleurs rejeté les deux réformes constitutionnelles soutenues par la gauche qui leur étaient proposées par référendum. La première défendait l’annulation de la loi de « caducité », qui a empêché toute poursuite contre les policiers et militaires coupables de violation des droits de l’homme durant la dictature. La seconde réforme visait à autoriser le vote par correspondance des Uruguayens de l’étranger.

    La première fois que José Mujica est arrivé au Palais législatif avec son jean délavé, son nez empâté et sa vieille moto, un gardien lui a signalé que les places de parking étaient réservées aux législateurs. « Mais mon ami, je suis député », lui a répondu Mujica, qui venait d’être élu. C’était en 1999.

    Dimanche, cet ancien guérillero de 74 ans surnommé affectueusement « Pepe », candidat de la coalition de centre gauche du Front élargi, est arrivé en tête du premier tour des élections pour succéder à Tabaré Vazquez, premier président de gauche de ce pays de 3,5 millions d’habitants. José Mujica est un des fondateurs de la guérilla urbaine Mouvement de libération nationale-Tupamaros (MLN-T) responsable d’enlèvements, de sabotages et d’attentats pendant la dictature (1973-1985). Il a reçu plusieurs balles et a passé treize années en prison, où il a subi tortures et mauvais traitements.

    Libéré en 1985, il assure aujourd’hui être un démocrate convaincu et il est devenu, malgré son franc-parler, un fin négociateur qui a su placer l’unité du Front élargi au-dessus de tout autre objectif, jouant un rôle fondamental dans son arrivée historique au pouvoir en 2005.

    « Pepe », ministre de l’agriculture de 2005 à 2008, est adoré par les classes les plus défavorisées, qui apprécient son langage direct, mais moins par « l’establishment ». Pourtant, il a promis de suivre la ligne tracée par Tabaré Vazquez : économie ouverte aux investissements, politique fiscale rigoureuse, plans d’aide sociaux… « Mon modèle pour l’Uruguay, c’est (le président brésilien) Lula, et je suis ami (du président vénézuélien) Chavez, a reconnu Mujica. Comme Chavez est assis sur un baril de pétrole, il peut se permettre des libertés pas possibles. Moi je ne vais pas exproprier. »

    Il a aussi promis de ne pas opposer son veto si le Parlement légalise l’avortement, comme l’a fait l’an dernier Tabaré Vazquez. Si Mujica est élu, l’Uruguay, pays laïque depuis 1919, pourrait donc devenir le deuxième pays d’Amérique latine, après Cuba, à légaliser l’IVG. Après avoir été le premier, il y a deux mois, à autoriser l’adoption d’enfants par les couples homosexuels.


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  • Ce paysan indien représente, à l'Assemblée nationale bolivienne, les planteurs de coca.

    Il défend l'usage traditionnel de la petite feuille contre la politique d'éradication du gouvernement. « Je détiens le record national: en août 1997, j'ai été élu avec 70,13 % des voix à l'Assemblée nationale de Bolivie. Le tout sans dépenser un sou pour ma campagne », déclare en guise d'introduction Evo Morales. « Et je suis fier d'être considéré en Europe comme le député des producteurs de coca. » Engoncé dans un blouson de cuir fatigué, une sacoche défraîchie sous le bras, le député s'apprête, à l'aéroport de La Paz, à partir pour Caracas, où il rencontrera des militants vénézuéliens. Il voyage tant, de Genève à Porto Alegre, qu'il n'a plus franchement le temps de s'occuper de ses champs. Pourtant, il a encore un demi-hectare de coca. « Je représente le peuple, le mien, les Aymaras, et tous les Indiens, qui sont la majorité dans ce pays. » Or le peuple bolivien semble avoir de plus en plus de mal à accepter non seulement la politique d'éradication de la coca, dictée par Washington, mais aussi la politique du gouvernement en général, celle qui a notamment consisté à vendre, sinon à offrir aux multinationales les joyaux du pays, que ce soit les mines, les gisements de pétrole ou encore la gestion de l'eau avec à la clé de nombreux emplois perdus.

    « Mon programme politique va au-delà de la défense de la coca traditionnelle », explique le député, en prenant son café, aussi ambré que sa peau. « Le capitalisme d'Etat est un échec, de même que le néo-libéralisme. Ce que nous voulons, c'est récupérer nos entreprises, non pas pour les rendre à l'Etat, totalement corrompu, mais pour mettre sur pied un système d'autogestion », explique-t-il. Un mécanisme qui s'accorderait sans doute bien avec les traditions indiennes de la région. Lui qui n'a pas terminé l'école secondaire aligne les chiffres: « Ce sont 3 milliards de dollars qui ne circulent plus dans l'économie du pays depuis trois ans, en raison de l'éradication de la coca. Et si l'on ajoute les privatisations mal faites et la corruption, endémique dans le pays, ce sont 7 milliards de dollars qui ont disparu. »

    Evo Morales se souvient de son enfance, sur les hauts plateaux boliviens. « Dans ma famille, nous n'avions souvent qu'un quintal de maïs pour toute l'année. Je ne mangeais qu'une demi-orange par an les pelures en plus... » La misère noire de ses jeunes années a conduit sa famille à émigrer dans le Chapare, pour cultiver le riz et la coca. S'il a connu, comme tous les Indiens du pays, la discrimination et l'aliénation culturelle, il n'en a pas pour autant été anéanti. Il s'est rebellé pour de bon, un jour de 1980. « A cette époque, le pays était écrasé par la dictature des narco-trafiquants, et ce sont ces hommes qui ont brûlé vif un paysan de mon village », raconte-t-il. Cette tragédie a servi de détonateur. La révolte le mènera au syndicalisme, puis à la politique. Elu député en 1997, il reconnaît que les autres parlementaires « ne sont pas franchement satisfaits de mon travail, surtout quand je propose des enquêtes sur les fortunes mal acquises; le gouvernement a même voulu me mettre hors d'état de nuire en m'accusant de sédition, mais je résiste ». Son but est aussi de lutter contre ce qu'il appelle la « narcocratie », très présente selon lui au sein du gouvernement... Dans ces conditions, vouloir détruire la coca consiste de son point de vue en une belle hypocrisie, qui ne sert qu'à redorer le blason international du pays, à massacrer les Indiens, comme au temps de la dictature, et à renforcer la main mise de Washington sur la région.

    La colère du peuple bolivien paraît telle actuellement qu'Evo Morales ne voit que deux issues possibles: « L'insurrection armée, mais je ne veux pas d'un bain de sang, ou la mise en place d'une Assemblée constituante. Le peuple doit écrire sa propre constitution et retrouver sa dignité et sa souveraineté. Ce nouveau millénaire doit être celui de l'Indien », conclut-il. La culture de la coca serait-elle inscrite dans une nouvelle constitution ? « Nous sommes certes disposés à faire des cultures alternatives. Mais à une condition: que l'on nous achète nos produits à des prix justes, pour que nous puissions enfin sortir du sous-développement », répond Evo Morales.


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  • Le gouvernement bolivien et le syndicat paysan CSUCTB ont conclu, samedi, un accord selon lequel le syndicat s'est engagé à lever « immédiatement » les barrages sur les principales routes du pays. L'accord ne s'applique pourtant pas à la région de Chapare (centre), où les producteurs de coca, conduits par le député de gauche Evo Morales, contrôlent un axe primordial pour le pays. De son côté, le gouvernement a accepté de revoir dans les soixante jours la loi controversée sur les terres, d'améliorer le système de distribution des propriétés en zone rurale et de renoncer définitivement à une loi sur l'eau qui prévoyait la taxation de l'usage des sources.


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  • Evo Morales, le leader des producteurs de feuilles de coca, a décidé en fin de semaine dernière d'engager des discussions avec le gouvernement. 15.000 producteurs de coca paralysent une grande partie du trafic routier depuis onze jours en Bolivie afin de protester contre la politique anti-drogue du gouvernement qui les contraint à détruire leurs cultures. Des milliers d'autres paysans ont rejoint le mouvement pour protester contre la politique foncière des autorités, alors que les enseignants sont en grève depuis deux semaines pour obtenir des augmentations de salaire.


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  • A PAZ, 26 juillet, Reuter - Le gouvernement bolivien a ordonné mardi soir la libération progressive de 53 planteurs de coca qui avaient été arrêtés il y a 10 jours.

    De source gouvernementale, on a déclaré que 34 d'entre eux avaient déjà été libérés et avaient regagné leurs foyers à Chapare, principale région productrice de coca.

    Les autres, dont le porte-parole des planteurs Evo Morales, seront remis en liberté prochainement, a-t-on ajouté.

     

    "Ces libérations entrent dans le cadre du processus de négociation avec les planteurs de coca", a-t-on dit.

    Des syndicats avaient organisé une grève générale mardi pour protester contre l'état de siège, reconduit pour 90 jours la semaine dernière en raison de la résistance des planteurs de coca aux efforts du gouvernement de réduire les cultures.


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